Dans une copropriété, les travaux entraînent souvent des dépenses importantes et plus ou moins imprévues, financées au travers d’appels de fonds collectés auprès des copropriétaires. Il ne faut cependant pas confondre les travaux votés, anticipés et ayant pour but des améliorations ou réparations précises, et les fonds de travaux institués par la loi. La principale distinction étant certainement le caractère obligatoire de ces derniers. Il est intéressant de se pencher sur ces fonds travaux, ce qu’ils sont, leurs particularités mais également leurs utilités et utilisations.
Qu’est-ce qu’un fonds de travaux ?
Les fonds de travaux ont toujours existé en copropriété. Historiquement, avant 2017, de nombreuses copropriétés utilisaient ce que l’on appelait des fonds de prévoyance. Ils n’étaient pas obligatoires et ni leur montant ni leur utilisation n’étaient encadrés. Face à la détérioration du parc immobilier français et notamment des copropriétés, l’Etat a souhaité réagir en mettant en place un système permettant d’anticiper les dépenses de travaux. Le but étant ainsi de faire face aux dépenses d’entretien des parties communes des copropriétés qu’elles soient ou non prévues dans le budget prévisionnel.
La législation est venue entériner cette décision avec la loi ALUR du 24 mars 2014, tout d’abord, qui a rendu obligatoire la constitution d’un fonds de travaux pour presque toutes les copropriétés. Ce fonds devant être placé sur un compte séparé, il permet ainsi aux copropriétaires de constituer une épargne utilisée uniquement dans le but d’améliorer la condition de leur immeuble. La législation a poursuivi la tendance avec les lois “ELAN” et “Climat et résilience” qui ont réactualisé la loi ALUR avec les besoins et les enjeux de notre époque que ce soit en termes de besoins énergétiques ou d’écologie. Ainsi a vu le jour le PPT (Plan Pluriannuel de Travaux).
Quelles copropriétés sont concernées ?
Toutes sont concernées. Pour se soustraire à l’obligation du fonds ALUR, les rares copropriétés exemptées doivent répondre aux conditions suivantes :
- Avoir moins de 5 ans,
- Avoir moins de 10 lots et que l’AG ait voté à l’unanimité de ne pas constituer de fonds,
- Pouvoir fournir un diagnostic technique global (DTG) indiquant que la copropriété n’a pas besoin de faire de travaux dans les 10 prochaines années,
- Avoir déjà constitué un fonds supérieur ou égal au montant du budget prévisionnel de la copropriété.
Hormis ces cas, les copropriétés ne peuvent voter la non-constitution de ce fonds. Cependant la législation n’a pas prévu dans les textes de sanction si elles ne répondaient pas à leurs obligations.
Quelles obligations et quelles évolutions ?
Pour la copropriété
Les règles de ce fonds ne sont pas figées, comme le montre l’évolution de la législation depuis 2014. Elles sont encore amenées à évoluer dans le temps afin de s’adapter aux problématiques écologiques et de rénovation énergétique du parc immobilier national.
Il existe cependant des constantes :
- Obligation de constituer un fonds ALUR de 5% du budget prévisionnel au minimum par rapport aux tantièmes prévus au règlement de copropriété,
- Ouvrir un compte bancaire séparé afin d’y déposer les sommes collectées.
Dans les années à venir, les copropriétés vont également devoir élaborer un plan pluriannuel de travaux (PPT) dont la cotisation minimale devra être à la fois à hauteur de 2,5 % du montant des travaux prévus dans le plan mais aussi de 5 % du budget prévisionnel.
Toutes les copropriétés de plus de 15 ans devront présenter ce plan à l’ordre du jour des AG selon le calendrier suivant :
- copropriétés de plus de 200 lots : janvier 2023,
- entre 50 et 200 lots : janvier 2024,
- moins de 50 lots : janvier 2025.
Pour le copropriétaire
Contrairement à son prédécesseur le fonds de prévoyance, le fonds de travaux ALUR est acquis à la copropriété. Ainsi, lors des ventes, il ne peut faire l’objet d’un remboursement auprès du vendeur. La somme allouée, correspondant aux tantièmes du copropriétaire établis dans le règlement de copropriété, reste attachée aux lots de celui-ci. Aucune exception ne peut être faite. L’acquéreur d’un bien dispose ainsi des fonds versés par son prédécesseur pour les lots objets de la vente.
Quelles utilisations pour les fonds de travaux ?
Jusqu’à l’entrée en vigueur du plan pluriannuel, ce fonds pourra être utilisé pour le financement de :
- tous les travaux de conservation et d’entretien des équipements communs votés à l’article 25 ou 25-1, à l’exception de la maintenance,
- tous les travaux d’amélioration tels que la transformation, l’adjonction, l’aménagement, l’affouillement ou la surélévation,
- tous les diagnostics et études techniques,
- tous les travaux qui ne seraient pas de la maintenance, de l’administration des parties communes, du fonctionnement d’équipements,
- tous les travaux urgents nécessaires à la sauvegarde du bâtiment qui restent à l’appréciation du syndic.
La modification de la législation va changer l’usage de ce financement et ce dès l’entrée en vigueur du plan pluriannuel de travaux. Il permettra dorénavant :
- la réalisation du PPT ou DTG par un professionnel,
- la réalisation de travaux prévus par le PPT,
- l’exécution de travaux nécessaires à la sauvegarde de l’immeuble décidés par le syndic,
- la mise en œuvre de travaux non prévus dans le PPT mais nécessaires à la sauvegarde de l’immeuble, à la préservation de la santé et de la sécurité des occupants ou à la réalisation d’économies d’énergies.
Ainsi le plan pluriannuel de travaux est appelé à aider chacun dans le choix de ses priorités. Côté propriétaires, il incite à effectuer les travaux de remise en état afin de faciliter la vente des biens, en ne perdant pas les sommes investies au profit du propriétaire suivant. Côté gestionnaires, les évolutions successives de la législation impliquent un travail de veille et de conseil auprès des propriétaires. Pour tous, le fonds de travaux implique une anticipation des besoins des bâtiments en copropriété.